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1]1] Mon bon frere, j’ai receu voz lettres par le commandeur Meneses, present porteur, et ai esté tres joyeulx sçavoir par lui bien particulierement de voz bonnes nouvelles. Il m’a dit et aussi baillé par escript sa credence et le semblable a fait Salinas de ce que au paravant lui aviez commandé me dire, en quoi j’ai trouvé beaucop de bonnes choses, desquelles je vous mercie cordialement et pour vous y faire responce.

2]2] Premiers quant au mouvement des Lutheriains et des maulvaises choses qu’ilz ont faites et est apparant continueront de pis, il m’en a despleu et desplet amerement, et s’il estoit en moi d’y pouoir de promptement remedier, je le feroie sans y espargner ma personne ni mes estas, mais vous voyez l’incommodité qu’il y a bien que j’espere d’estre bientost en Ytalie pour illec prendre mes coronnes, comme desia vous ai escript, et cela fait, je m’employerai de tout mon pouoir à l’extermination de la secte desd. Lutheriens, non faisant aulcune doubte que, actendant mad. venue, pourvoyerez à l’encontre d’eulx le mieulx que pourrez, comme avez tres bien fait jusques ici, et oultre l’honneur et merite que y acquerrez envers dieu et le monde je m’en tiendrai grandement tenu à vous.

3]3] Quant à la depesche que demandez des lettres et instructions necessaires que avez envoyées pour l’adresse de vostre election à roi des Romains et que je vous advertisse de quoi je vous veulx et pourrai aider pour gagner les electeurs en lad. election, je vous prie bien panser et considerer, si le seroit bien convenable à voz affaires et miens que tel chose se fait maintenant. Vous sçavez et cognoissez la condicion desd. electeurs, et ne croi point que tout l’or d’Espaigne les sceut à present gaigner pour la doubte que ceulx que bien entendez ne nous aiment gueres y pourroient mectre avec force sousperon, zizanie, scrupules et diffidence, grande jalousie tant entre lesa) potentaz d’Ytalie que aultres princes d’Allemaigne. Ilz pourroient aussi allegher, comment il est vrai, que presentement je ne suis en effect sinon roi de Romains et d’en faire eslire un aultre, je renunceroie à mon election et me pourroient sur ce dresser telz brouielliz avec l’assistence desd. malveillans que j’auroie bien affaire d’eschapper de quelque inconveniant et en auriez vostre part d’austant que mon dommaige vous touche de ci-prèz. Parquoi, mon bon frere, je vous conseille que faictes tenir ceste matiere bien secrete et que avant la descouvrir voyez que j’ai prins mesd. coronnes d’empereur. Cela fait, il n’y aura faulte que vous aiderai pour lad. election de tout mon pouoir et ferai lors plus à cause de ma presence pour ung florin d’or que maintenant pour ung million avec ce que, comment dit est, la chose ne se peult faire que ne soie coronné et seroit argent perdu et destruire tout d’en parler au temps qui occourt presentement.

4]4] Quant à cela de la distribucion du sel de Millan, cela est desia fait, comme vous ai adverti, et n’y aura poinct de faulte rien desire je que sachez que le m’avez fait demander bien à point pour cause du pape, pour lequel mes gens avoient promis de procurer en vertu d’ung traicté secret, fait hors la lighe.

5]5] Quant à la depesche pour la diete à la sainct Michiel,b) je la vous ai envoyée par le chemin de Flandres à cause qu’elle n’eust peu estre pourtée en dilligence par terre.

6]6] J’escriptz presentement à plusieurs princes d’Allemaigne, les advertissant, comme j’ai conclud de m’aler coronner dedens bref temps, comme plus au long les advertirez, je ne leur escriptz point qu’ilz s’apareillent ni aussi qu’ilz viennent, car ilz me demanderoient argent et vouldroient avoir recompense ci-aprèz, parquoi aussi qu’ilz ne sont tenuz venir à lad. coronation. M’a semblé qu il n’estoit besoing l’en faire aultre mention que de gracieusetéz, comme mesd. lettres le contiennent, j’ai fait laisser les superscriptions en blanc et toutes ouvertes, afin que les faictes fermer et superscripre ainsi et a qui mieulx vous semblera, et croi qu’elles serviront pour avoir bonne et plus briefve depesche et conclusion de lad. diete de la saint Michiel. Soubz couleur que environ ce temps pourrez commancer a prendre vostre chemin pour me venir trouver et actendre à Millan, car je desire singullierement de vous veoir et joir de la doulceur et plaisir fraternelle de vostre presence et communiquer premierement ensemble de tous noz affaires. Je vous advertirai de bonne heure, quand devrez partir d’Allemaigne et souffira pour maintenant que faictes vostre cas tout prest en bonne ordre, comme ne fais doubte sçaurez bien faire.c)

7]7] Le roi de France est maintenant pardeça; je l’ai fet mectre au chasteau de Chativa, la où il sera bien traicté. Il m’a fait bailler et ouffrir pour la paix aucuns articles dont vous envoie copie et dit qu’il fera encoires mieulx. Je vous advertirai de ce qu’il en sera et s’il y a chose que soit à mon honneur et prouffit et à la conservation de mes amis, je croirai vostre conseil d’y entendre, car je congnois bien qu’il me seroit fort propice d’avoir paix avant que passer en Italie, si je ne la puis aussi avoir, je ferai tenir led. roi de France en bonne sheurté pardeça et me deliberai à tout effect de guerre pour l’année prouchaine. Mais pour laisser ces royaulmes en bon ordre et gouvernement, je n’y vois aultre remede que de me marier à l’infante donna Ysabel de Portugal, ce dont les courtes desd. royaulmes m’ont requis, me offrant pour ce grand service, et d’aultre part le roi de Portugal me offre ung million de ducas, la pluspart comptant, que seroit pour aider à fournir aux frais de mond. voyage d’Ytalie et pourroie laisser le gouvernement de pardeça en la personne de lad. infante que seroit avec bon conseil pourveue de sorte qu’il n’y auroit apparance de doubter inconvenient de nouveaulx mouvemens aussi ensuivant vostre bon conseil. J’entendz bien de mener avec moi aulcuns grandes ou leurs mayorasges, toutesfois je ne puis ni veulx entendre aud. mariaige sans premiers avoir deux choses :d) l’une c’est le consentement du roi d’Angleterre et renouvellant noz amitiéz, comme desia lui ai escript et en actendz responce, l’aultre c’est que je desire avoir de vous, comme de mon bon frere, vostre advis et conseil sur tel matiere. De laquelle avant que led. Meneses arrivast, je vous vouloie advertir expressement par led. Salinas, et desia avoie fait obtenir son saulfconduit pour le faire passer par terre et lui fait retarder pour la venue dud. Meneses, lequel j’ai aussi tant faict tarder pour vous advertir clerement de la resolucion de tous mes affaires, et combien que je y eusse prins conclusion, toutesfois n’ai volsu la faire executer dez que j’ai sceu led. roi de France et mon viceroi de Naples estre arrivéz pardeça, car vous sçavez que de nouveau fait nouveau conseil et ainsi je laisse tous mes affaires d’Ytalie en suspens, jusques mond. viceroi soit vers moi, lequel j’ai mandé guerre.

8]8] Et pour vous dire mon intencion c’est de non faire aulcune guerre pour ceste année, mais entendre aud. mariage et aud. voyage d’Ytalie par mer et descendre à Genues, selon que me conseillerez, et que les affaires le pourront porter, si une bonne paix se pouoit conclure. Et pour ce, mon frere, je vous depesche led. Meneses, vous priant que le me renvoyez le plustot que pourrez avec vostred. advis et conseil tant sur mond. mariage que mond. voyage et semblablement sur lesd. articles de la paix que m’a fait proposer led. roi de France. Et si je prins quelque aultre conclusion avec mond. viceroi, touchant lad. paix et voyage d’Ytalie, vous en advertirai, mais je croi que led. Meneses, comme il est dilligent, viendra bien à temps devant que en l’ung ni l’aultre se face chose digne d’escripre.

9]9] Quant aux papiers, trouvéz es coffres dud. roi de France, desquelz desirez avoir copie, le tout est en Ytalie, et, quant je y serai, vous ferai communicquer tout ce qu’il y aura ainsi que à moi mesmes. Et afin que voyez les gracieusetéz dud. roi de France et de moi, je vous envoie copie de trois lettres qu’il m’a escriptes et de la responce que lui ai fait.

10]10] Quant aux Suysses, je vous mercie ce que en avez fait et me semble que ce sera bien fait de les entretenir de pratiques, mais de leur bailler argent il seroit perdu et mal employé.

11]11] De vous faire lieutenant general en Ytalie nous en communicquerons ensemble vous et moi, quant je serai pardela, car en beaucop plus grande chose vous vouldroie complaire et vous entremectre en mes affaires à vostre honneur et reputacion qu’est la mienne et suis bien certain que vous y sçaurez tres bien acquicter.

Il me desplait que jusques à oires ne s’est trouvé occasion, mais doresenavant que noz affaires sont prosperes, dieu grace, tout se pourra faire à vostre desir qu’est conforme au mien et ung mesme vouloir et intencion.

12]12] Quant à la debte du duc George de Sassen, je vous prie de rechief en avoir pacience que ne sera pour long temps, car si pouons avoir bonne paix, vous sçavez qu’il n’y aura faulte aud. payement et se feront entre vous et moi de grandes choses au service de dieu, bien de chrestienté et à nostre perpetuelle bonne renommée et n’est besoing que me requerez de faire garder voz droits envers les Venissiens, car mon intention est telle et y a maintenant bonne occasion pour le faire, mais il fault encoires dissimuler, afin qu’ilz ne nous dressassent quelque inconvenient, comme bien l’entendez.

13]13] Quant à l’ambassadeur de Moscovye, je renvoie avec lui le conte de Padua qui y fut dernierement et lui donne charge pour traicter et qu’ilz passent par devers vous et se conduise, comme lui ordonnerez.

14]14] Quant au fait de Hannart, je ne l’ai bien entendu à cause de la maladie que lors j’avoie. J’ai mandé à led. Hannart venir ici pour respondre de ceste affaire. Et quant à Michiel Gillys, il est à Perpignan. Vous ferez bien de m’envoyer par led. Meneses, ce qu’est de ceste matiere au cler avec les informations que en aurez fait prendre, comme desia vous ai escript, car la chose touche tant à vous et moi que ne la veulx laisser en obli ou endormie, mais le veulx bien entendre, pour ce qu’elle est fort commune et en parle l’on en diverses sortes. Vous me pourrez envoyer homme doct, bien instruict à cest effect au plustot que pourrez, afin de respondre à ce que led. Hannart vouldra dire pour ses excuses ou descharges, si elles seront telles que veritables et raisonnables.

15]15] Quant au proces des terres que tenez en Bourgongne, j’en desire fort une fin par appoinctement amiable, comme desia vous ai escript, car d’en bailler la congnoissance par justicee) à mon chancellier seroit contre les privilleges du pays, mais par lad. voie amiable que seroit le meilleur j’en ferai mesler ceulx à qui vous et la partie contraire vous vouldrez soubmectre et si ferai garder vostre droit et me ferez plesir.

16]16] J’aurai pour recommandéz le conte de SalmeSalm, Niklas, Graf et ses enffans ensuivant ce que m’escripvez. Et pour commencer j’ai escript au duc de Millan lui donner quelque bonne rante. Moi estre sur le lieu, je lui aiderai plus avant, puis que le merite si bien à nostre service.

17]17] Quant à Suero de l’Aguilla, je lui ai fait restituer ses biens saulf les juros, lesquelz j’ai fait appliquer à ma coronne et ne pourroie rompre ceste loi sans avoir une merveilleuse importunité d’aultres, parquoi je desire qu’il se contante.

18]18] Ausurplus quant aux pensions pour le sr de Sampy et vostre maistre d’hostel Hemericourt, combien que je suis fort chargé au temps qui court, toutesfois pour l’amour de vous et en faveur de leurs services leur ai voluntiers accordé lesd. pensions, assavoir aud. sr de Sampy six cens livres et aud. Hemericourt trois cens livres dont j’ai ordonné leurs depesches en mes pays de pardela.

19]19] Mon bon frere, je ne vous sçauroie aultre chose escripre, jusques j’aie, comme dit est, vostre bon advis et conseil que desire fort, et est la cause principale, pourquoi je vous renvoye led. Meneses avant l’arrivé de mond. viceroi. Vous me ferez singullier plesir que j’aie bien tost de voz nouvelles. Mon bon frere, nostre seigneur vous doint ce que plus desirez.

Escript à Toledo, le 25e de jung 1525.f)