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1]1] Monsr, j’ai par le sr de Bredam receu vostre lettre du dernier de fevrier dernierement passé et par lui entendu de vostre bonne santé et disposition qui m’ont estées les plus joyeuses et recreatives nouvelles que m’eussent sceu avenir, combien que au paravant tant par lettres de Vre Mte comme autrement en avoie desia amplement esté averti dont en louhe dieu le createur et prie vous y entretenir en amendement.

2]2] J’ai, monsr, semblablement entendu par led. sr de Bredam le bon vouloir et amour fraternelle qu’avez envers moi et la bonne depesche qu’il vous a pleu lui faire sur sa charge dont de tout vous mercie très humblement et dieu me doint la grace et moyen de sçavoir le tout desservir envers Vostred. Mte, car il ne tiendra à bonne voulenté fors a l’impuissance. Toutesfois, monsr, comme maintesfois vous ai escript et faict dire, je demeurerai à jamais vostre tres humble, tres obeissant et tres leal frere pour ma personne avec ce que dieu m’a donné estre employéz à accomplir tout ce entierement qu’il vous plaira me commander, non faisant doubte que la reste de l’instruction dud. sr de Bredam qui n’a peu estre depesché à cause de la diversité du temps Vre Mte aura le tout, quant le temps la donnera mieulx en vostre meilleure souvenance et recommandation, ce que vous supplie, monsr, tres humblement avoir.

3]3] Quant à la depesche que le sr de Bredam m’a rapporté, touchant ce pays et conté de Tyrol, j’ai, monsr, prolonghé et retardé la prinse de possession d’icellui pour quelque peu de temps à cause des alterations y estans et jusques à estre achevée et veoir quelle fin prendra une diette que pour la pacification desd. paysans, je tiens ici avec eulx et les estatz de ced. pays, où, comme je puis entendre, veullent proposer et demander choses qui ne pourroient tourner à vostre honneur et auctorité, combien que de mon pouoir ne se y conclura riens de si mauvais fruict qu’ilz entendent. Laquelle estre finée, vous avertirai amplement de tout ce que se y fera, affin que, si je n’y puis autrement remedier, il vous plaise y ordonner aultre remede convenable, car, combien, comme desia vous ai, monsr, escript et averti, iceulx paysans aient faictz beaucop de maulx, voire que moi mesmes ne puis bonnement partir du pays à cause des passaiges qu’ilz tiengnent pour craincte que ne leur y face entrer gensdarmes pour les occuper et garder de parfaire leur intention et emprinse, combien qu’ilz ne se sont levéz en armes ni ont encoires commis chose contre ma personne et espere qu’ilz ne feront. Neantmoings si augmente journellement leur mutation en mal, car desia ont prins, sacquaigéz et pilléz oultre cent chasteaulx oud. pays, entre lesquelz y est ung nommé Tirol, nom dud. pays, et semblablement tous les monasteres et abbayes qu’ilz treuvent, disans qu’ilz veullent iceulx ensemble les gens d’eglise avoir destruictz et adnichilléz. Et quant à ce que s’est fait et fait journellement par tout l’empire, il n’est, monsr, possible vous sçavoir le tout escripre, ainsi qu’il est, toutesfois je vous envoye avec cestes ung double, par lequel pourrez veoir la pluspart des chasteaulx et monastaires qui desia sont destruictz où pays de Francongne seullement sans ce qui s’est innumerablement fait ailleurs. Et affin que semblablement sçaichez l’exploict qui a esté fait à l’encontre desd. paysans, vous advise aussi, monsr, que tant la ligue et Zwave que ce que le duc de Lorraine a faict contre ceulx que estoient entréz en son pays pour le gaster, desquelz à quatre ou cincq fois a tuéz environ 27000 hommes tellement que ce et l’exploict de lad. ligue et de quelques princes monte à plus de 50000 paysans mortz et tuéz. Laquelle chose devroit estre cause de les faire venir à raison, mais l’on ne s’en peult encoires percevoir, et aussi, quant au pays de Ferrette, la mutation desd. paysans y est si tres avancée en mal que pis ne seroit, de maniere que je n’y ai plus que quatre ou cinq villes et chasteaulx qui tiengnent bon pour moi et semblablement au pays de Stier se commancent à revolter tantost si avant que les aultres.

4]4] Au pays de Salsburg tout le commung y est semblablement tout rebellé et revolté et ont les paysans desia si avant poursui leur intention qu’ilz ont prins tout entierement le pays, villes et chasteaulx ensemble la ville de Salsburg, reservé le chasteau d’illecq, oùquel lesd. paysans tiengnent assiegéz leur archevesque.

5]5] Aussi vous avise, monsr, comme puis quelques jours ença est allé de vie à mort le duc Frederick de Saxen, et semblablement par tout les pays de Saxonie s’ont revoltéz et mutinéz comme aux aultres lieux.

6]6] Monsr, je vous supplie tres humblement avoir bon et brief advis sur les choses dessusd. ensemble sur tout ce que Meneses, mon chambellan, vous a dict de ma part et à tout veullez pourveoir convenablement, et si mon advis estoit d’accepter, il me semble, monsr, soubz correction, actendu mesmement que ce sera pour le bien repoz et transquilité non seullement de la Germanie, mais aussi de l’universelle chrestienté que Vre Mte ne devroit laisser à faire quelque bonne et durable paix avec le roi de France, moyennant que l’honneur, auctorité et reputation de Vre Mte y soient gardéz, affin que le plustost qu’il vous sera possible puissez passer en Ytalie, veu que tant mieulx et plus facillement pourrez pourveoir aux affaires de l’empire et à toutes choses, comme desia par led. Meneses et Salines aurez peu entendre plus amplement, ou autrement je voie toute la Germanie estre en perplexité si tres grande que certes, monsr, s’il y a plus beaucop de dilacion, est en danger de tumber en perpetuelle ruine et desolacion. Parquoi de rechief vous supplie, monsr, tres humblement y bien penser et pourveoir. Atant prierai etc.

D’Isbroug, ce 17e de juing ao 25.

7]7] Depuis cestes escriptes est ici arrivé Espaigne que le viceroi m’a envoyé pour me faire sçavoir de son partement avec le roi de France et qu’il prenoit son chemin pour mener led. roi pardela devers Vre Mte dont ai esté tres joyeulx, esperant que tant plustost sera cause de parvenir à quelque bonne paix à vostre honneur et reputation, à la transquillité de toute la christienté.

8]8] Monsr, Salines vous dira aulcunes choses de ma part. Je vous supplie tres humblement le croyer, comme moi mesmes. Donné comme dessus.