TranskriptTranscript

1]1] Monsr treshumblement à vostre bonne grace me recommande. Monsr j’ai receu quatre voz lettres assçavoir du dernier d’octobre, premier et 18e de novembre, lesquelles ont esté bien desirées selon le temps que avoie esté sans avoir eu nouvelles de vostre bonne santé et prosperité et suis si joyeulx que ne sçauroie plus de ce qu’elles sont telles comme les esperoie et prie le createur vous y entretenir, vous suppliant treshumblement m’en advertir le plus souvent que faire se pourra.

2]2] Quant aux affaires, ferai par cestes responce et premiers touchant cellui du Turcq. Je vous ai monsr par Hemericourt, mon maistre d’hostel, mandé au long la resistance que de la part du roi de Hongrie et de la mienne y pouons faire qu’est bien petite contre si grande puissance, led. roi de Hongrie pour la petite obeissance qu’il a en ses pays et moi pour la grande povreté qu’ai trouvé es miens. Or en l’empire j’ai trouvé ce que soubsçonnoie et que je croi avez trouvé vous mesmes, quant y avez esté; car après avoir traicté par trois mois ont accordéz quatre mil pietons payéz pour six mois, lesquelz craindz ilz ne bailleront encoires à cause des guerres et differens qu’ilz ont par ensemble. Parquoi monsr vous supplie, comme plusjeurs fois ai faict, vueillez avoir souvenance aud. roi de Hongrie et de moi et nous aider et assister ou aultrement sans aucune doubte nous aurons tant à souffrir qu’est à craindre perdrons noz pays que vous doibt estre grant regret.

3]3] Touchant ma venue à ceste diette, je croi monsr qu’elle n’a point esté prejudiciable à vostre honneur et auctorité mesmes estans les affaires de l’empire en l’estat où ilz sont. Lesquelz ne sçauroient pis, et afin que particulierement en soyez monsr adverti vous dis que le conte Palatin, l’archevesque de Treves et lantgrave von Hessen sont en guerre contre Francisque de Sequin comme desia vous ai escript. Lequel Francisque par ses practicques a meu les Bohesmois à ce que pour une meschante querelle que ung docteur, nommé Fuxstain, ci avoit au lantgrave von Lichtenberg à cause d’ung chasteau qu’est assis es pays dud. conte Palatin et sont entréz dedens ses pays où ilz ne font gueres de bien. Puis après aucuns contes comme cellui de Zoleren et de Fustemberg joinctement avec grande partie de la noblesse font ungne ligue ensemble pour eulx joindre avec led. Francisque à l’encontre des susd. princes et taichent fort à tirer encoires avec eulx aulcunes villes imperiales.

4]4] Item les susd. princes, comme vous ai monsr escript, composerent l’archevesque de Mayence en la somme de vinct cincq mil florins d’or dont led. archevesque et toute sa maison se treuvent grandement grevéz en leur honneur et n’entendent laisser ainsi l’affaire, combien que je me emploie de tout mon pouoir à les accorder.

5]5] Item les susd. Bohesmois vueillent courir sus au marquis Joachim pour quelque querelle d’aulcuns fiefs.

6]6] Item envers les pays d’Elsatie et aussi Suysses l’on en parle d’ung bontescuz qu’est une assemblée des paysans et meschans gens qui demandent liberté sans vouloir recognoistre seigneur.

7]7] Item le duc Ularick de Wiertemberg du chasteau Oghetueil, ne taichent sinon de faire du pis qu’il peut.

8]8] Item ceste doctrine de Luthere est si enracinée par tout l’empire que pour le jourdhui de nulle personne il n’y a poinct ung qui n’en tiengne quelque peu tellement monsr que le tout est en si mauvais estat qu’il ne sçauroit pis, et si ne regardez d’y pourveoir de bonne heure, je craindz que pourries venir trop tard, et que ne sera en ma puissance y pouoir remedier, combien que je ne espergne point ma paine, estant depuis la vue du jour jusques à une heure de nuict en conseil et traictant vers les ungs et vers les aultres pour regarder de evicter les grans maulx que je voi apparans. Desquelz je vous ai bien voulu avertir, afin monsr que, s’il en avenoit autrement que bien que n’en soie demandé, vous avisant monsr, que, si je ne fusse venu à ceste diette, les choses fussent pour ceste heure bien pis qu’elles ne sont.

9]9] Quant au personnaige que de voz Pays d’embas debvoit ici venir pour estre et resider au gouvernement de l’empire et aider à conduire et impetrer quelque bonne aide contre le Turcq, il n’est encoires venu, mais j’espere que mme, nostre tante, l’envoyera puis que lui avez monsr escript, combien que pour l’affaire du susd. Turcq il viendroit trop tard et quant oires il fust venu de bonne heure, comme ai desia dict. Tout le monde a tant à faire à garder le sien qu’il ne leur souvient d’autrui, parquoi il eust faict peu de fruict.

10]10] J’ai monsr joinctement avec le regiment receu la responce des articles qu’avez envoyé aud. regiment, lesquelz rendront peine mectre à execution.

11]11] Quant aux deux contes ou barons que m’ordonnez monsr mectre ou camerghericht, il en sera faict ensuivant vostre commandement.

12]12] Je vous mercie monsr de ce qu’avez escript à mme, nostred. tante, qu’elle ait à entretenir les postes jusques à Neuremberg, car au moyen de ce pourrez plus souvent estre averti des affaires de pardeça.

13]13] Le pouoir que vous avoie demandé pour commectre ung aultre lieutenant en l’empire, c’estoit monsr, comme sçavez, en cas que le conte Palatin n’y voulsist demeurer et non autrement et de l’enhorter à ce qu’il y demeure, croyez qu’il ne tiendra à moi, car certes monsr il est bien idoine et ne espergne point sa paine à vous servir et, cependant qu’il y vouldra demourer nullement, conseilleroie y commectre aultre.

14]14] Monsr quant aux Venetiens, voz ambassadeurs estans vers eulx m’ont escript avoir commancé à traicter avec eulx. Et pour ce que lesd. Venetiens faisoient difficulté et ne vouloient conclure aulcune chose sans avoir plaine puissance et auctorité depar moi, m’en ont escript iceulx voz ambassadeurs que leur eusse à donner. Ausquelz ai faict responce que je y vouloie envoyer mes propres ambassadeurs pour traicter de mes affaires, consideré que ce qu’ilz m’avoient escript n’avoient riens traicté à mon aventaige et aussi que n’en ai aucunement comandement ou ordonnance de vous de leur bailler aucun pouoir.

15]15] Quant au duc George de Saxen, je vous avertis monsr que lui tant prie par lectres et par ambassadeurs qu’il voulsist avoir quelque peu de pacience, comme si je deusse avoir gaigné ung pays et l’ai trouvé si rude et dur que non seullement n’a voulu riens faire, mais m’a escript et mandé se vouloir plaindre de moi à ses amis et ailleurs. Et pour la conservacion de nostre honneur et evicter le scandale et inconveniens qui pourroient venir lui ai offert l’en payer promptement 50000 florins d’or en baghes et 25000 en argent comptant et autres 25000 en deans ung an et la reste tous les ans 10000 jusques à fin de payement. De quoi n’a voulu estre content. Je doubte que aussi ne sera il des lettres que lui en avez escriptes, parquoi vous supplie monsr vouloir donner ordre de le contenter autrement, pour evicter ce que m’en pourroit avenir.

16]16] Les commissaires qui doivent venir pour vacquer à l’audition des debtes de feu l’empereur monsr et grant-pere, cui dieu absoille, je les actens encoires et vouldroie bien qu’ilz fussent venuz pour eschever beaucop de langaiges qui ne font riens à vostre honneur ni au mien.

17]17] Touchant des nouvelles des Suysses, je vous avertis monsr qu’ilz ne se sont encoires deliberéz d’aller servir le roi de France ne ceulx de la ligue Grise aussi. Et quelques poursuites que les susd. François ayent fait n’ont jusques à present encoires riens exploictié ni vers les ungs ni vers les aultres. J’ai tousjours mes espies vers eulx que entretiens à grosses depenses et donne à des aucuns grosses pensions, afin que, s’ilz conclusoient quelque chose, en soie averti. Et quant sçaurai aulcune chose qu’il m’en surviendra digne d’escripre vous en avertirai à toute dilligence.

18]18] Au regard des susd. Bohesmois, je vous avertis monsr que les practiques des François y sont plus grandes envers eulx et ont plus de lieu selon que micer Andrey del Burgo m’en escript que vers les Suisses ou autre nation en l’Allemaigne. Parquoi ferez bien monsr leur en escripre quelques bonnes lettres pour eulx retirer de ceste opinion. Et de ma part j’ai fait, comme faiz encoires journellement, mon leal debvoir.

19]19] Je suis monsr bien joyeulx de sçavoir du bon succes des affaires de pardela, duquel vous supplie monsr m’avertir souvent, car la joie que j’en ai m’est cause de plus aiseement porter les paines et labeurs des affaires de pardeça.

20]20] Touchant le fait des enffans de Michiel von Hezinghen, je ferai monsr de sorte avec eulx qu’ilz auront cause d’eulx en louher et congnoistront voz lettres leur avoir esté prouffitables.

21]21] J’ai monsr entendu que le roi de Portugal vous doibt avoir envoyé quelque ambassade, afin que vous eussies à depporter de la navigation de l’espisserie, dont monsr, si m’en voulez croire, n’en ferez riens, si selon dieu et justice la pouez retenir, car avec le temps il pourra estre cause d’ung grant bien et richesse pour voz pays de pardela et de pardeça.

22]22] Je loue dieu monsr que tous les pays de pardela sont reduictz à bonne obeissance, que n’a point esté peu d’euvre selon qu’ai entendu estoient esmeuz. Si d’aventure monsr venies au dessus de Fontarabie, comme j’espere, ferez avec l’aide de dieu. Je vous supplie en estre incontinant averti, afin que joinctement avec vous en puisse recepvoir joie de la victoire.

23]23] J’ai monsr entendu ce que m’escripvez concernant le rappel de l’allegacion où micer Andrea del Burgo est. Lequel me semble que feries bien entretenir encoires en Hongrie. Car quant oires n’y auries nullui y devries envoyer quelque bon personnaige, veu l’estat où les affaires de Hongrie, Bohesme et aussi ceulx de l’empire sont presentement mesmes les practicques des François. J’ai monsr sur cest espoir que l’auries pour agreable rescript aud. micer Andree demourer et continuer à sad. legation jusques à vous en avoir averti. Parquoi, s’il vous plaist, en escriprez vostre bon plaisir et, si ainsi estoit, qu’il fust que y demeurast encoires vous plaira aussi lui ordonner par les Focqueres ou quelque aultre marchant son salaire et entretenance accoustumée, afin que tant mieulx il se puisse entretenir.

24]24] Les susd. Turcqs tout au long de cest iver ont faict beaucop de venues et encoires font en Croacie que n’a jamais esté veu et ont prins et bruslé aucuns chasteaulx. Semblablement ai nouvelles, comme le Turc entend venir en personne au royaulme de Hongrie, parquoi de rechief vous supplie monsr treshumblement vouloir donner ordre à quelque aide et secours et ne penser que de l’empire doyons avoir aucune assistence que vaille la paine.

25]25] Je vous avertis monsr que le contenu aux lettres que m’escripvez est plustost sceu pardeça par aultres que par moi et de ce que j’en escriptz font le semblable par voz secretaires de pardela, et entre aultres choses sçai que tout ce que vous ai escript concernant la lieutenandise de l’empire et ce que m’avez respondu est plustost venu à la congnoissance du conte Palatin que à la mienne. Parquoi debvez monsr pourveoir à voz conseilliers ou susd. secretaires qu’ilz aient à exercer leurs estatz plus conforme au nom qu’ilz portent qu’ilz ne font ou autrement l’on ne sçauroit comme bonnement vous escripre la verité de plusjeurs choses concernans vostre honneur, prouffit et le mien.

26]26] Monsr le marquis de Brandemburg Joachim est comparu en ceste diette. Lequel a parlé par plusjeurs fois à moi et traicté sur le fait du mariaige de l’infanta Catherina, nostre seur, et autres choses comme s’ensuit.

Et premiers m’a dict comme icelle nostred. seur lui fust promise par parolles de present par feu l’empereur, nostre grant-pere, cui dieu absoille, lui estant à Augsbourg bien peu avant son trespas, aiant auctorité d’icelle infante à son filz aisné, et que depuis monsr a esté par vous ratiffié. Parquoi prie et supplie que ensuivant lad. promesse il vous plaist icelle permectre sortir son effect, consideré que selon dieu et iustice elle ne peult avoir autre mari ne lui autre femme et avec ce qu’elle eust tel doct comme lui avoit esté promis.

Secundement se plaind grandement comme desia vous ai monsr escript du tort qu’on lui fait d’avoir donné la investiture au duc de Pomeren contre les lettres que par vous lui ont esté depeschées. La copie desquelles joinctement avec celles du mariaige vous envoye ici encloses. Parquoi requiert estre restitué et reintegré à sa possession et annichiller la investiture, donnée au duc de Pomeren.

Tiercement dit lui avoir esté promis 40000 florins d’or pour une foiz et huict ou dix mille de pension sa vie durant, comme appert par lettres autenticques. Desquelles vous envoye aussi la copie, parquoi demande estre satisfaict de lad. somme des deniers et d’icelle pension.

Led. marquis s’offre que, en ce faisant, il est content se departir totalement de l’alliance et amitié qu’il a avec le roi de France et renuncer entierement à tout et se conduire et gouverner envers vous et vostre service de sorte que congnoistrez qu’avez en lui ung bon serviteur et subgect.

Surquoi je lui ai respondu ce qu’il me sembloit servir à propos et qu’estoit necessaire et après plusjeurs autres devises, tant d’ung costé que d’autre il s’est resolu à ce qu’il vous plaise faire sortir effect, comme dict est, la promesse et mariaige de sond. filz avec nostred. seur l’infanta Catherina. Et de toutes les aultres choses et querelles il les remect entierement à vous monsr et à moi, bien dist il qu’il croit ne vouldries faire lad. infante bastarde et que ainsi estoit et que nullement fust possible bailler icelle enfanta que en ce lieu, lui vueillez monsr bailler la roine de Portugal mme Leonora. A quoi lui ai monsr respondu que de ma part n’avoie aucun pouoir ou auctorité de vous pour traicter ni de ce ni d’aultre chose, mais que de bon cueur je vous en escriproie que lui voulsissies estre si gracieulx que de lui accorder et condescendre à sa requeste et aussi que de ma part le vous supplieroie voulentiers ce que fais monsr treshumblement, consideré que la promesse lui en a esté faicte et d’autrepart que pour le present je ne voi gueres de princes en la christienté où l’on la sceust mieulx bailler ne allier. Et de ce qu’en vouldrez monsr faire vous supplie aussi treshumblement m’en faire responce, car je lui ai promis le lui faire sçavoir desincontinant que l’aurai.

27]27] Semblablement m’a parlé l’archevesque de Maiance, disant que lui avez monsr donné 10000 florins d’or de pension, desquelz il ne peut estre payé dont il s’en treuve fort adommaigé pour les grans affaires qu’il a et necessité où il est constitué et m’a prié vous vouloir escripre et supplier donner ordre et commectre qu’il soit paié et contenté ensuivant ses lettres et promesse ou s’il vous plaist le pourveoir de quelque dignité ou pension sur icelle en valeur à icelle somme de 10000 florins d’or. Laquelle il acceptera voulentiers, parquoi de ce qu’en sera vostre bon plaisir lui respondre sur ce vous plaira m’en avertir aussi.

28]28] Par mon maistre d’hostel Hemericourt vous ai aussi monsr escript et supplié avoir souvenance des bons et leaulx services que l’evesque de Trante a fait au feu l’empereur monsr et grant-pere, que dieu absoille, et à vous sans pour ce jusques au present avoir eu aulcune recompense, affin qu’il vous plaist le pourveoir de quelque bonne dignité ou pension, ce que de nouveau vous supplie treshumblement, car il l’a bien merité et merite journellement en l’adresse de voz affaires de pardeya.

29]29] Je vous ditz monsr de rechief que la susd. assemblée des contes, gentilzhommes et villes ne se fait seullement pour aider et assister Francisque, mais pour faire beaucop pis et à l’encontre de vous pour le premier et de moi et ma maison et de la plus grande part des princes de l’empire et pour conclusion il en y a tant de mal que ne le sçauroie assez dire, parquoi vous supplie en pourveoir monsr etc. Du 27e jour de janvier ao 22.